Ce soir, c’est soirée Jeux (Psychologiques) !
Vous aimez les jeux de société ? Moi j’adore ça. J’adore jouer, et surtout… j’adore gagner !
Dans les relations, il existe aussi des jeux, qui se jouent également en société, mais qui se terminent généralement avec deux perdants ou plus. J’ai nommé : les jeux psychologiques. Ça vous parle ?
Les jeux psychologiques sont la manifestation de relations non satisfaisantes. Eric Berne les définit comme une série de transactions complémentaires avec un message secret, qui conduit à un bénéfice négatif psychologique prévisible.
Ils sont bien plus présents dans nos vies qu’on ne le pense :
- En famille, haut lieu des jeux psychologiques : « Ta sœur, elle, elle nous appelle au moins » ; « Avec tout ce que j’ai fait pour vous »
- Dans le couple : « Si tu m’avais écouté, on n’en serait pas là » ; « Je t’aime moi non plus »
- Dans l’entreprise : « Pourquoi ça tombe toujours sur moi ? » ; « Tu sais ce qu’il dit sur toi ? »
- Etc.
Les jeux psychologiques ne sont pas là par hasard. Ils sont là pour renforcer nos croyances et scénarios, et recevoir des signes de reconnaissance (même négatifs). Ils sont basés sur des stratégies de notre enfance pour obtenir ce que nous cherchions. En clair : Adulte, les jeux psychologiques sont des stratégies périmées qui finissent TOUJOURS mal.
Récemment j’ai eu à faire à quelques parties de jeux psychologiques. Alors comment les reconnaitre ? Et surtout comment en sortir ?
Comme Eric Berne l’a mis à jour dans son célèbre livre « Des jeux et des hommes », des jeux psychologiques il en existe un rayon : « Battez-vous » ; « Oui mais » ; « Pourquoi faut-il toujours que tu » ; « J’essaye seulement de t’aider » … Pour faire simple, je vous propose d’analyser les jeux psychologiques sous l’angle du triangle de Karpman, dit triangle dramatique.
Comment débute un jeu psychologique ?
Eric Berne a créé cette formule : Amorce + Point faible = Réponse transactionnelle[1]
Un jeu psychologique démarre toujours par l’amorce d’une personne (Mr/Mme Leblanc, en référence au premier joueur d’échec) envers une autre (Mr/Mme Lenoir). Une amorce, comme un appât, c’est une transaction à double fond : il y a un message caché derrière le message apparent. Par exemple, en entreprise : « Avec toute la charge que j’ai en ce moment, je ne vais jamais y arriver ». Ici le message caché est : j’ai besoin d’aide.
Le point faible (de Mr/Mme Lenoir face à l’amorce de Mr/Mme Leblanc) est ce qui fait qu’une amorce va prendre et va faire réagir Mr/Mme Lenoir. Si mon amorce est « Si c’est comme ça, je ne dirais plus rien, tu ne sais pas écouter », celle-ci découlera sur un jeu si je touche une caractéristique que mon interlocuteur considère comme un point faible chez lui, par exemple ici : la capacité à écouter.
Mr/Mme Lenoir apporte alors une réponse transactionnelle, le jeu est lancé.
Le triangle dramatique
Dans ce scénario, les joueurs se répartissent 3 rôles (même s’ils ne sont que deux à jouer) et vont naviguer tantôt dans l’un tantôt dans l’autre en fonction de l’interlocuteur : le Persécuteur (ou Bourreau), la Victime et le Sauveur. Chacun des 3 rôles cherche à nourrir un besoin et une attente qui ne sont pas exprimés de manière explicite.
D’ailleurs ces trois rôles sont généralement présents dans tous les films et pièces de théâtre à différents moments de l’histoire.
Le Persécuteur : c’est le bourreau de l’histoire. Ses grandes attitudes sont :
- Critique négativement l’autre et ses actions
- Rabaisse l’autre
- Fait pression, menace
- Coupe la discussion avec des propos définitifs
- Il est sévère et catégorique
- Se libère de ses pulsions agressives
La Victime : c’est le Calimero de l’histoire. Ses grandes attitudes sont :
- Se dévalorise elle-même
- Se sent en infériorité et le dit
- Se plaint et rumine
- Soulève des problèmes qu’elle rencontre sans proposer de solution
- Ne prend pas sa responsabilité
- Fais en sorte d’être critiquée
- Ne tient pas ses engagements
Le Sauveur : c’est le Superman de l’histoire. Ses grandes attitudes sont :
- Propose, voire impose, son aide sans qu’on lui ait demandé
- Cherche à obtenir la gratification et la reconnaissance par son soutien et son aide
- Rend les autres dépendant de lui
- Dévalorise la capacité de l’autre à trouver des solutions par lui-même
- Se sent supérieur dans son apport d’aide empathique
- Défend les opprimés et s’engage contre les situations d’injustice
- Agit de manière non-appropriée, voire intrusive
Lorsqu’un jeu psychologique s’installe, nous allons adopter chacun de ces 3 rôles en fonction du rôle adopté par notre interlocuteur.
Exemple :
- Mes crises d’anxiété me bouffent la vie (victime)
- Tu devrais voir un médecin (sauveur)
- Oui mais j’ai peur qu’il me juge (victime)
- Je peux t’accompagner (sauveur)
- Oui mais je ne veux pas te faire perdre ton temps (victime)
- Ça ne me dérange pas, je n’aime pas te savoir mal (sauveur)
- Oui mais de toute façon les médicaments ne fonctionnent pas (victime)
- Bon y en a marre, secoue-toi un peu, si tu ne veux rien faire pour aller mieux, ce n’est plus mon problème (persécuteur)
- Ne te met pas en colère (victime)
- Tu es fatigant à la fin (persécuteur)
- Je suis désolé (victime)
- Moi aussi j’ai mes problèmes et la vie n’est pas simple tous les jours (victime)
- Ah bon, qu’est-ce qu’il t’arrive ma pauvre ? Raconte-moi tes malheurs (sauveur)
- Etc.
Comment en sortir ?
Les jeux psychologiques répondent à un besoin essentiel à la survie psychologique de l’être humain : les signes de reconnaissance. Nous avons soif de stimulus physiques et mentaux et de reconnaissance (article ici).
La première étape pour sortir du jeu est d’en prendre conscience et d’identifier dans quel rôle se trouve chacun des protagonistes.
La deuxième étape est de reconnaitre votre responsabilité dans le déroulement du jeu. Pour qu’un jeu existe il faut être deux. Quelle a été votre amorce, ou votre point faible, qui a permis au jeu de démarrer ? Reconnaitre sa part de responsabilité est essentiel afin que vous ne vous fassiez plus embarquer la prochaine fois qu’une même situation se présente. Pour travailler cela, l'accompagnement coaching est une bonne option (elveor).
La troisième étape, c’est revenir au besoin caché :
- Pour aider la victime à sortir de son rôle, faire clarifier la demande : de quoi auriez-vous besoin ? En quoi puis-je vous aider ?
- Pour aider le persécuteur à sortir de son rôle, faire préciser les limites à respecter : Qu’est-ce que tu souhaites me dire ? Qu’est-ce qui te cause de l’agacement dans cette situation ?
- Pour aider le sauveur à sortir de son rôle, remercier pour l’aide proposée, reclarifier son propre besoin et poser des limites : Je te remercie pour ta sollicitude, j’ai plutôt besoin de trouver une solution par moi-même.
La quatrième étape, c’est requestionner vos croyances (article ici) et vous repositionnez en position gagnant/gagnant avec votre interlocuteur.
La cinquième étape, c’est vous tenir loin des joueurs professionnels.
Privilégiez le « triangle du gagnant » théorisé par Acey Choy :
- Rôle de vulnérabilité (plutôt que Victime) : reconnaitre sa propre difficulté à faire face à ce qui lui arrive, demander une aide explicite, apprendre à gérer ses émotions et à les partager de manière constructive
- Rôle de souci de l’autre (plutôt que Sauveur) : choisir d’aider et doser l’attention proposée à l’autre en veillant à ce que celle-ci soit ok avec le fait d’être aidée. Proposer une aide différée : « je reste à ton écoute quand tu souhaiteras partager »
- Rôle d’affirmation de soi (plutôt que Persécuteur) : affirme son point de vue, prend position, pose des limites tout en respectant l’autre dans sa valeur
Enfin, cultivez les signes de reconnaissances positifs, explicites et ajustés.
Je vous souhaite des parties gagnant/gagnant :)
Pour aller plus loin :
- Daniel Chernet : https://www.manufacture-des-equipes.fr/wp-content/uploads/2022/02/triangle-karpman.pdf
- Eric Berne, Des jeux et des hommes, ed. Stock, 1984
[1] A + PF = RT -> CP -> MC -> BN : Amorce + Point faible = Réponse transactionnelle -> Coup de théâtre -> Moment de Confusions -> Bénéfice négatif
- Camille Lamouille -
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